Retour sur «COVID-19 : des réponses à vos questions»

Légalité du passeport vaccinal : La Cour tranchera

Même si le décret rendant obligatoire le passeport vaccinal pour accéder à certains lieux n’est plus en vigueur, le recours judiciaire visant à le faire déclarer illégal doit être entendu parce qu’il est «d’un grand intérêt pour la justice et pour l’intérêt public lui-même», vient de trancher la Cour supérieure.

L’avocat Hans Mercier et le notaire Gaston Vachon tentent depuis l’automne de faire invalider ledit décret, adopté le 1er septembre dernier, puis abandonné le 12 mars.

Comme le décret n’est plus en vigueur, le Procureur général du Québec a demandé à la Cour supérieure de rejeter la requête des professionnels beaucerons, alléguant que le débat est maintenant théorique.

Le juge Daniel Dumais ne voit pas les choses du même œil.

Dans son jugement daté de lundi, le juge de la Cour supérieure rappelle que la pandémie à l’origine du passeport vaccinal n’est «certainement pas terminée». De ce fait, les mesures sanitaires adoptées pourraient s’avérer nécessaires à nouveau, souligne-t-il.

«Le ministre [de la Santé, Christian] Dubé a lui-même affirmé qu’il valait [mieux] garder le passeport vaccinal sur son téléphone advenant une nouvelle vague. L’hypothèse de son retour n’est donc pas farfelue», écrit le juge Dumais.

Le magistrat souligne également que la restriction du passeport vaccinal a fait couler beaucoup d’encre, que plusieurs groupes et individus s’y sont opposés et qu’on a souvent évoqué ou mis en doute sa légalité. Un débat «contradictoire» demeure, donc.

«Dans ce contexte, le Tribunal opine que le caractère légal, ou non, du passeport est d’un grand intérêt pour la justice et pour l’intérêt public lui-même. Les oppositions, contestations et soulèvements en font la démonstration», résume le juge Daniel Dumais.

Selon lui, «mieux vaut la réponse de la Cour que celle de la justice parallèle qui s’exprime quotidiennement sur les réseaux sociaux».

«Le débat soulève les passions et la question risque de se répéter à l’avenir dans d’autres dossiers, ce qui pourrait gruger beaucoup d’énergie à l’appareil judiciaire et n’encourage pas une saine économie de ses ressources», expose le juge.

Le débat légal «mérite une solution», et l’aspect légal d’une loi ou d’un décret relève des tribunaux, rappelle le juge Dumais.

«Le procureur général du Québec plaide qu’il ne sert à rien de prolonger le débat. Selon lui, même si on devait revenir en arrière et réinstaurer le passeport, il faudrait juger la situation en fonction des nouvelles circonstances et non de celles prévalant en septembre 2021. Le Tribunal ne peut s’en convaincre», écrit le magistrat.

S’il est vrai que la validité de cette mesure est tributaire du contexte sanitaire au moment de son adoption, «l’analyse finale de la Cour fournira […] des indications pertinentes et utiles aux fins d’une nouvelle mesure», fait valoir le juge Dumais. «Comment peut-on croire que le jugement rendu ne puisse servir à rien dans le futur?» demande-t-il.

Le juge Daniel Dumais estime du reste qu’il faut «reconnaître la nécessité, parfois, d’aller au fond des choses même si le besoin réel n’est plus le même et a évolué».

«Les mesures prises en situation d’urgence sont généralement de courte durée et attaquées par des demandes de sursis qui ne donnent pas la chance d’obtenir un éclairage complet, utile pour le futur. De là, une autre raison pour que le Tribunal se prononce sur le fond de l’affaire», conclut-il.