Retour sur «COVID-19 : des réponses à vos questions»

Fin annoncée du port du masque & Troubles du langage

L’abandon presque complet des masques d’ici la mi-avril au Québec apparaît comme une libération pour les Québécois souffrant de trouble du langage.

C’est le cas de l’ancienne animatrice Josée Boudreault, frappée il y a quelques années par un AVC qui l’a laissée aphasique. Ce handicap la force à s’exprimer avec lenteur, à l’instar des 100 000 autres aphasiques au Canada.

«Déjà que c’est dur pour nous autres de parler. Imagine avec un masque! C’est dur. Juste dire les mots avec ça c’est l’enfer», explique-t-elle au Devoir.

«On a rencontré des gens dans la trentaine. Pas encore de chum, pas encore de famille. Ils pensaient qu’ils avaient tout le temps du monde. Ils se ramassent tout seuls. Ils démarrent des activités pour s’aider et là, avec la pandémie, ils se retrouvent deux ans chez eux à presque ne pas parler», raconte son conjoint, Louis-Philippe Rivard.

Pour ces personnes à l’élocution difficile, la guérison passe par la reprise des conversations. «C’est comme apprendre une langue étrangère», compare M. Rivard. Il va sans dire que la distanciation physique a retardé, voire contrecarré cette réadaptation.

«Avec la pandémie, pour la première fois, les associations nous rapportent un recul dans les fonctions langagières», confirme Carole Anglade, orthophoniste qui se spécialise dans la participation sociale des gens aphasiques. «Le port du masque, la distanciation physique aussi, donne beaucoup moins d’indices de décodage pour les personnes qui ont de la difficulté à comprendre les autres.»

«En général, au pire du pire, la personne stagne. En général, elle progresse. Mais, depuis deux ans, on le constate sur le terrain: les personnes se débrouillent moins bien pour communiquer. Et pas juste sur le plan langagier, mais aussi sur le plan moteur», ajoute-t-elle en référence aux autres personnes souffrant de paralysie.

«C’est déjà dur de faire un Zoom avec du monde qui est bon, qui parle comme il faut. Tout le monde s’enterre quand on est plus que 4 ou 5, remarque Louis-Philippe Rivard, qui parle pour sa conjointe. Là, tu hésites, tu as de la misère à rentrer dans la conversation et, le temps que tu t’essaies, ils sont rendus ailleurs.»

Le retour des rencontres en personne soulagera ainsi des milliers de gens aphasiques pour qui les liens virtuels sont impossibles. «Quand vous êtes en face de la personne, on peut plus compter sur son attitude, sa bienveillance. C’est extrêmement facilitant pour ces personnes », note Carole Anglade.