Transport adapté : une grève complique les projets des usagers à mobilité réduite

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Les chauffeurs de taxi qui offrent du transport adapté ne se satisfont pas d’une prime ajustable sur le carburant proposée par la STM.

Les usagers du transport adapté par taxi de la Société de transport de Montréal (STM) doivent trouver d’autres solutions pour se déplacer en fin de semaine. Entre colère et frustration, certaines personnes à mobilité réduite se sentent prises en otage par la grève en cours jusqu’à lundi par l’Association des chauffeurs de taxi accessible du Québec (ACTAQ).

Le débrayage a débuté vendredi.

D’importantes perturbations étaient attendues sur le service de transport adapté par taxi, a prévenu la STM dans un avis.

Pour qui ne possède pas de voiture adaptée et dépend du transport public pour ses déplacements, cette grève peut être un véritable casse-tête dans la région de Montréal. « Il n’y a que 19 stations de métro sur 68 qui sont accessibles », a déploré Linda Gauthier, présidente du Regroupement des activistes pour l’inclusion au Québec (RAPLIQ), en entrevue à D’abord l’info, sur ICI RDI.

La STM a assuré qu’elle accorde la priorité aux trajets pour les rendez-vous médicaux, mais elle n’accepte plus de nouvelles demandes de réservation pour la fin de semaine, sauf pour des consultations médicales, a informé son service de relations publiques, par courriel.

« On dit qu’on respecte les rendez-vous médicaux. Il n’en demeure pas moins que la grève a des impacts le vendredi et le lundi […], s’il y a des usagers qui travaillent ces jours-là et qui doivent prendre le transport adapté », a souligné Mme Gauthier.

Il n’est pas non plus possible de « se rabattre sur les taxis qui offriraient les courses parce qu’ils sont solidaires, évidemment, de leurs collègues qui ont des contrats avec la STM », a-t-elle noté.

Quant aux autobus de la STM comme solution de repli, « bien souvent, la rampe est défectueuse ou le chauffeur est assez frileux à l’idée de [nous] embarquer. Il y a encore beaucoup de discrimination », a aussi observé Linda Gauthier.

Revalorisation salariale

La présidente du RAPLIQ a reproché au ministre des Transports, François Bonnardel, de ne pas comprendre la réalité des personnes en situation de handicap mobile et d’avoir laissé une telle grève se concrétiser.

« Il a mis sur table des conditions absolument abominables, il ne veut plus payer pour les adaptations des taxis qui coûtent au-delà de 25 000 dollars », a-t-elle cité en exemple.

Les revendications des chauffeurs portent notamment sur une réévaluation des taux horaires, qu’ils souhaiteraient voir augmenter à 75 $ pour les fourgonnettes adaptées et à 65 $ pour les berlines « étant donné que la prime sur le carburant, tant pour son mode de calcul que pour sa compensation financière, ne peut constituer une solution efficace et durable afin de stopper l’hémorragie actuelle et son impact négatif majeur sur la rentabilité financière pour le chauffeur », a fait valoir l’ACTAQ.

Plus tôt au printemps, la STM a mis en place une « prime sur le carburant » destinée aux fournisseurs de taxis accessibles pour compenser l’inflation.

Le montant de cette prime dépend des distances parcourues et du prix du carburant sur une base mensuelle. Il fait l’objet d’un réajustement chaque mois.

« Cette prime est accordée lorsque le prix moyen du carburant s’élève à plus de 1,55 $/litre, et ce, jusqu’à concurrence de 2,50 $/litre. Les montants de la prime pourraient donc fluctuer entre 0,00 $ et 0,15 $ par kilomètre parcouru. Cette prime sera en vigueur jusqu’à la fin de l’entente contractuelle avec les fournisseurs de taxis accessibles », a précisé la STM.

La mesure reste très insuffisante, a dénoncé l’ACTAQ par la voix de son vice-président.

« On considère que ce n’est pas la solution, parce qu’elle est conjoncturelle. Ce qu’on veut, ce sont des solutions structurelles qui nous permettent d’être payés au prix correspondant à l’activité que nous exerçons », a fait valoir Abdelaziz Lamheme, vice-président de l’association.

M. Lamheme a évoqué les semaines de négociations stériles avec la STM, envenimées par les effets de la pandémie et de la crise économique.

« C’est venu aggraver notre situation, qui était déjà précaire, a-t-il regretté. Nous ne faisons que reporter d’année en année ces revendications. […] Ces discussions débouchent toujours sur une impasse, on tend l’oreille et on nous écoute, mais quand il s’agit de prendre des décisions, on est exclus et on se retrouve pratiquement dans un statu quo. »

En réponse de courriel, la STM a écrit être « ouverte à la mise en place d’autres solutions et [souhaiter] poursuivre les discussions pour trouver des solutions justes et équitables ».

Chauffeurs de taxi en grève et usagers pénalisés s’entendent toutefois sur un point : le transport adapté devrait être considéré comme « un service essentiel ».

Publié le 09 juillet 2022
Par Avec les informations d'Aimée Lemieux et de Caroline Lacroix