En mars 2023, la Commissaire à la santé et au bien-être (CSBE), Johanne Castonguay, a publié un rapport intitulé Bien vieillir chez soi – Tome 1 : Comprendre l’écosystème. Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’un virage majeur envisagé par le ministre de la Santé et des Services sociaux, dont l’objectif est d’améliorer les programmes de soutien à domicile et de répondre plus efficacement aux besoins des usagers, face aux problématiques mises en lumière par la pandémie de Covid-19.
Ce rapport détaille et évalue la situation actuelle des services de soutien à domicile offerts au Québec, tout en documentant leur accessibilité, les défis rencontrés et les besoins futurs.
Ressources financières
Au Québec, le pourcentage de dépenses publiques alloué aux soins de longue durée est considéré comme faible en comparaison avec les autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). En effet, seulement un cinquième des dépenses en soins de longue durée est consacré aux soins à domicile, comparativement à environ la moitié dans certains pays européens tels que le Danemark.
En ce qui concerne les services à domicile et les soins communautaires, le Québec se situe au 11ème rang des provinces canadiennes, avec une dépense de 259$ par habitant.
En 2020, le Ministère de la Santé et des Services sociaux a dépensé près de 2 milliards de dollars en soutien à domicile et 700 millions de dollars en crédits d’impôts pour les proches aidants et l’aide à domicile. Cependant, selon Johanne Castonguay, ces dépenses ne permettent pas de rattraper les autres provinces.
Le soutien à domicile reste difficilement accessible pour les personnes au statut financier plus précaire, et les mesures financières ne suffisent pas à combler les besoins de la population.
Du côté des employés, les conditions de travail sont peu intéressantes, il est donc difficile d’attirer et de conserver la main-d’œuvre. En outre, les entreprises d’économie sociale en aide à domicile, qui prennent en charge les besoins non comblés par le Réseau, sont sous-financées.
Administration et accès
Le rapport souligne un manque de planification, d’évaluation des coûts et de mise en œuvre pour atteindre les objectifs de la politique gouvernementale de soutien à domicile en vigueur depuis 2003. Le manque de coordination entre les différents programmes et mesures financières entraîne des lacunes dans les services. Celles-ci sont partiellement comblées par des services communautaires qui bénéficient cependant de très peu de ressources.
Selon la CSBE, les établissements se concentrent principalement sur les volumes de services plutôt que sur les besoins réels des personnes ayant recours au soutien à domicile. Pour la commissaire, il est préférable de mieux structurer les ressources humaines et financières disponibles plutôt que de tenter de les augmenter.
Le rapport souligne également que « l’offre de soutien pour les proches aidants est davantage pensée pour les personnes âgées » (Bien vieillir chez soi, 2023). La reconnaissance des besoins de la population, la cartographie des ressources territoriales et la prise en compte des disparités sont recommandées pour rendre l’offre de services plus adaptée aux différents types d’utilisateurs, notamment les personnes vivant avec des limitations fonctionnelles.
Actuellement, 18 918 Québécois attendent de recevoir des premiers services de soutien à domicile.
Pénurie de main d’œuvre
Au cours de l’année 2021, 381 228 personnes ont reçu des services et des soins à domicile au Québec. Depuis 2018, le nombre d’heures offertes a augmenté de 45%. Malgré cela, l’offre de services reste limitée, selon la commissaire. La rareté du personnel, aggravée par la pandémie, a entraîné de nombreuses conséquences, telles que des difficultés à adapter les horaires en fonction des besoins des usagers et le manque de continuité des services.
Une forte concurrence est présente entre les réseaux public, communautaire et privé pour le recrutement des travailleurs.
D’autre part, le rapport mentionne que les formations en médecine et en soins infirmiers comportent des lacunes en ce qui concerne les besoins en soutien à domicile, les enseignants ne connaissant généralement pas suffisamment le sujet. Avec une formation insuffisante, les travailleurs n’ont pas les connaissances requises, ce qui a des impacts sur la qualité du service, le partage d’information ainsi que sur la tenue des dossiers de la clientèle.
Finalement, les entreprises d’économie sociale en aide à domicile ont présenté leurs demandes au gouvernement afin d’améliorer l’accès aux services pour les personnes à faibles revenus par le Programme d’exonération financière pour les services d’aide domestique, bonifier le crédit d’impôt pour le maintien à domicile et pallier la pénurie de main d’œuvre, notamment en améliorant les conditions de travail de leurs employés.
Plusieurs projets seront réalisés au cours de l’année 2023, dont une analyse de la performance des services offerts sur les différents territoires du Québec et une veille stratégique de l’innovation. Ces initiatives permettront de recueillir des données qui seront utilisées pour formuler des recommandations en vue d’améliorer les services de soins à domicile offerts par le gouvernement du Québec.
En savoir plus
- [Communiqué] Mandat du CSBE sur les soins et services de SAD - Tome 1 - Bien vieillir chez soi : comprendre l'écosystème(Commissaire à la santé et au bien-être - CSBE, 28 mars 2023)
- [Communiqué] Services de soutien à domicile - La ministre Sonia Bélanger accueille positivement le rapport d'étape de la Commissaire à la santé et au bien-être(Cabinet de la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, 28 mars 2023)
- Les services de soutien à domicile demeurent « limités »(Radio Canada, 28 mars 2023)
- Soutien à domicile - Un « écosystème complexe » qui n’atteint pas les cibles visées(La Presse, 28 mars 2023)
- [Communiqué] La commissaire à la santé et au bien-être confirme que le virage reste à faire(Réseau de coopération des entreprises d'économie sociale en aide à domicile, 29 mars 2023)