Le 19 janvier 2023, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) a dévoilé une étude intitulée Blocage minimum : pour une gestion innovante des chantiers publics et privés, afin de rendre le centre-ville de Montréal plus attractif et accessible.
Selon cette étude, entre avril 2021 et mars 2022, 94% des artères du centre-ville ont été entravées « partiellement ou totalement à un moment ou un autre », et plus de 5500 permis ont été délivrés par l’arrondissement Ville-Marie. À l’automne 2022, 33% des 45 kilomètres de l’hypercentre étaient partiellement ou totalement bloqués : 4,6 km étaient affectés par des travaux publics et 10,2 km par des travaux privés. Les chantiers entraînaient la fermeture complète d’une ou plusieurs voies dans 65% des cas, et la suppression totale des trottoirs ou leur déplacement dans la rue avec une voie de passage sécurisée dans 80% des cas.
L’étude montre également que 25% des cônes recensés étaient « abandonnés », « inutiles » ou « sans objet ». Or, la présence excessive de cônes orange a pour effet de « désensibiliser » les automobilistes et les piétons à la « situation de danger » que ces cônes devraient signaler, entraînant des problèmes de sécurité.
La Ville de Montréal n’est pas la seule responsable, puisque seuls 30 % des chantiers relèvent de l’administration municipale. De fait, l’étude identifie une multitude de facteurs comme la gestion déficiente des chantiers dans l’espace public, une industrie de la construction trop morcelée, un empiètement systématique des chantiers privés sur la voie publique ou des règlements inadaptés du ministère des Transports pour les chantiers en milieu urbain.
Dans son étude, la CCMM propose un ensemble de solutions afin d’améliorer la fluidité des déplacements, qui ont été perturbés ces dernières années en raison de l’accumulation d’obstacles sur la voie publique. Elle recommande notamment que le gouvernement du Québec donne à la Ville de Montréal un contrôle complet sur la coordination des chantiers sur la voie publique, et que cette dernière établisse des outils de planification pluriannuelle et de coordination intelligente des chantiers.
La CCMM recommande également de limiter l’empiètement des chantiers privés sur la voie publique. La Ville, via les permis d’occupation de l’espace public, pourrait encadrer l’emprise et la durée de ces chantiers et ainsi limiter considérablement leur impact. Selon l’étude, les permis d’occupation sont trop faciles à obtenir pour les entrepreneurs. Par exemple, 96,4 % des demandes d’occupation du domaine public ont été acceptées par l’arrondissement de Ville-Marie en 2021-2022. Ils sont en outre moins onéreux pour eux que la location d’un espace privé. Aussi, la Ville devrait augmenter ses tarifs afin qu’il soit plus cher de bloquer une rue ou un trottoir.
La CCMM préconise de plus la mise en place de plans de contournement pour réserver certaines zones à la circulation active ou automobile lorsque la densité des entraves est trop forte.
Par ailleurs, pour améliorer la coordination des chantiers privés et publics, il est recommandé de mettre en place une plateforme centralisée gérée par Québec, Montréal et des partenaires tels qu’Hydro-Québec, Bell et Énergir. Cette plateforme regrouperait toutes les informations relatives aux travaux à venir ou en cours. Bien que Montréal dispose déjà d’une plateforme de planification intégrée des chantiers, seulement 7% de ces derniers y sont enregistrés, étant donné qu’il n’est pas obligatoire de s’y inscrire.
Enfin, la CCMM souhaite la révision des normes du ministère des Transports (MTQ) concernant l’utilisation des cônes orange, pour en réduire le nombre. Elle suggère de plus d’ajouter des codes QR sur les cônes orange pour que les citoyens puissent savoir pourquoi il y a un chantier, quand il doit finir et qui en est responsable.
De telles pratiques existent déjà ailleurs. Par exemple, dans certaines villes américaines, tout élément de signalisation doit être équipé d’un code-barres ou d’une puce RFID qui permet de collecter des données à distance. Cela permet aux citoyens d’en connaître en temps réel le propriétaire, la durée d’utilisation et la fonction. Les inspecteurs de la ville peuvent de plus déterminer rapidement si un équipement est autorisé à être sur la voie publique, retirer les éléments inutiles et verbaliser les entrepreneurs fautifs.
Faits saillants
La CCMM identifie 12 défis majeurs liés aux chantiers et à l’accès au centre-ville :
- La productivité sectorielle
- La planification intégrée
- La construction par phases
- La qualité des travaux publics
- Le niveau des investissements publics
- La coordination des chantiers
- L’emprise des chantiers privés
- La livraison de matériaux et équipements
- La culture de laisser-aller à l’égard des entraves
- La signalétique de chantier
- La gestion des nuisances
- La « mise en marché » des chantiers
La CCMM propose dix solutions concrètes :
- Développer une culture de la transparence, de l’imputabilité et de la participation citoyenne
- Repenser les paramètres de la planification horaire des livraisons
- Déployer une tarification dynamique incitative pour optimiser l’occupation du domaine public
- Rassembler l’ensemble des parties prenantes dans une entité intelligente responsable de la planification et de la coordination des chantiers
- Mettre en place un plan de micromobilité aussitôt qu’il y a une densité d’entraves minimale dans un même secteur ou axe de déplacement
- Créer des normes de signalisation adaptées à la densité du centre-ville de Montréal
- Intégrer de façon systématique dans les appels d’offres des critères liés à l’efficience et à la qualité des travaux
- Favoriser l’adhésion de la population au principe voulant que la modernisation du centre-ville exige des sacrifices
- Accélérer la modernisation du secteur de la construction par la création d’un chantier sur l’innovation et l’amélioration de la productivité
- Responsabiliser le secteur privé pour l’application de toutes mesures visant à faciliter la gestion des chantiers et à limiter les entraves à la circulation au centre-ville de Montréal
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