Des patients en attente d’une place à l’hôpital de réadaptation Marie-Clarac doivent être hébergés plus longtemps dans des hôpitaux de la région de Montréal.
Lors de son premier point de presse de l’année, début janvier, le ministre de la Santé se réjouissait de la baisse du taux d’occupation des lits d’hospitalisation par des usagers ne requérant plus de soins à l’hôpital.
On s’est beaucoup amélioré sur les patients qui ne requièrent plus de soins actifs [NSA]. On est passé de 13 % à 10 %, ce sont des signes encourageants, disait Christian Dubé. Au ministère, le taux cible est de 8 %.
Or, ces dernières semaines, la tendance est à la hausse, en particulier à Montréal, où le taux est remonté à plus de 12 %. Un retour à la case départ par rapport à la situation qui prévalait lors du lancement de la cellule de crise des urgences, le 1er novembre dernier.
Selon les informations obtenues par Radio-Canada, la capacité d’accueil réduite à l’hôpital de réadaptation Marie-Clarac a des effets domino sur le réseau.
En principe, l’établissement privé fondé par les Sœurs de la Charité de Sainte-Marie dispose de 192 lits de réadaptation, dont 141 dédiés aux CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal et du Nord-de-l’Île-de-Montréal.
Or, dans les faits, la situation est tout autre, explique l’adjoint au président-directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, Christian Merciari.
Actuellement, 41 des 91 lits de réadaptation de Marie-Clarac dédiés à notre CIUSSS sont fermés par manque d’effectifs, ce qui représente 45 % des lits destinés à nos usagers. Cette situation nous oblige à garder un nombre important de patients dans des lits de soins actifs dans les hôpitaux pour des durées de séjour de plusieurs jours, alors que ceux-ci devraient normalement être relocalisés, entre autres, à l’Hôpital Marie-Clarac, pour leurs besoins de réadaptation, ajoute-t-il.
Le CIUSSS regroupe les hôpitaux Maisonneuve-Rosemont et Santa Cabrini où les taux d’occupation des civières aux urgences sont à nouveau supérieurs à 100 %, après un apaisement en janvier.
« Actuellement, 54 de nos patients NSA ont des besoins de réadaptation intensive ou modérée et, compte tenu de l’offre limitée qui existe à l’Hôpital Marie-Clarac, ces patients doivent attendre dans nos lits d’hôpitaux qu’une place se libère pour eux. Cette réalité limite par contrecoup nos capacités d’hospitalisation pour de nouveaux patients. »
— Une citation de Christian Merciari, adjoint au président-directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal
Son de cloche similaire au CIUSSS voisin du Nord-de-l’Île-de-Montréal, où la moitié des 50 lits destinés à la réadaptation sont occupés à l’heure actuelle.
Pénurie de main-d’œuvre et de médecins à Marie-Clarac
À l’Hôpital Marie-Clarac, la directrice générale, soeur Martine Côté, se désole de ne pas parvenir à recruter de médecins depuis la pandémie.
La situation est très critique, dit-elle. C’est très difficile de trouver des médecins pour travailler en réadaptation, et ce qu’on nous dit, c’est que la rémunération n’est pas très attrayante.
Elle prévoit que les prochaines semaines seront difficiles et que le nombre de lits disponibles en réadaptation à court terme baissera de près de la moitié.
L’établissement ne disposera que de trois médecins après la relâche scolaire, par rapport à cinq actuellement. On en comptait près du double au début de la pandémie.
On a des médecins absents pour toutes sortes de raisons, que ce soit pour congé sabbatique, épuisement professionnel et des médecins en vacances pour la relâche, explique la directrice générale.
Déjà, en juin 2022, la direction de l’hôpital reconnaissait, dans son rapport annuel, les défis liés au recrutement de soignants et de médecins.
Malheureusement, l’établissement présente cette année un taux d’occupation nettement en deçà de l’obligation de notre entente de gestion, soit de 62,4 % par rapport à 95 %. Cette diminution est causée en général par la pénurie de main-d’œuvre, par la diminution de couverture médicale et par les différentes éclosions, écrivait-on.
À la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), on ne dispose pas de solution clés en main.
Quand il manque plus de 1000 médecins de famille au Québec par rapport aux besoins et que 467 postes de formation en médecine de famille sont demeurés vacants au Québec depuis 2013, on vit forcément une pénurie dans beaucoup de secteurs, et c’est notamment le cas, oui, dans certains centres de réadaptation comme Marie-Clarac, explique le porte-parole de la FMOQ, Jean-Pierre Dion.
Selon ce dernier, la rémunération et les modes de rémunération, au sens large, peuvent avoir un impact sur l’attractivité, oui, mais selon nous, la lourdeur de la pratique, la présence en nombre clairement insuffisant d’autres professionnels de la santé dans ces milieux et la pénurie tout court de médecins de famille expliquent principalement la situation.
Dégât d’eau à l’IUGM
Ailleurs à Montréal, d’autres situations ne favorisent pas la fluidité entre l’urgence, l’hospitalisation et le congé des patients.
Au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, un important dégât d’eau survenu récemment à Institut universitaire de gériatrie de Montréal (IUGM) a des répercussions.
47 usagers ont dû être relocalisés, les nouvelles admissions sont sur pause , ça a un impact sur les hôpitaux, précise un porte-parole. La situation devrait se résorber à compter de la semaine prochaine.
L’IUGM dispose de 446 lits de courte et de longue durée et d’un centre ambulatoire.
Selon les données les plus récentes du MSSS, près de la moitié des patients hospitalisés à Montréal ne requérant plus de soins à l’hôpital attendaient de l’hébergement ou des soins de réadaptation.