Flou juridique autour d’un vélo électrique qui peut rouler… à 90 km/h

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Les bicyclettes à assistance électrique sans plaque d’immatriculation, parfois interceptées à 79 km/h, illustrent le problème que représentent ces engins qui profitent d’un flou juridique pour gagner en popularité.

Si plusieurs vélos à assistance électrique ressemblent aux bicyclettes traditionnelles, beaucoup prennent l’allure d’une moto, à laquelle on ajoute des pédales et une chaîne pour respecter la réglementation.

C’est ce type de bicyclette assistée que conduisait un citoyen de Montréal lorsque les policiers l’ont intercepté à 40 km/h sur le boulevard Saint-Laurent en août 2020.

À Lachute, le 24 mai 2021, les policiers avaient intercepté le même type d’engin, cette fois à 79 km/h, alors qu’il était même interdit au fautif de conduire en raison d’une infraction pour capacités affaiblies.

Le Code de la sécurité routière définissant la bicyclette assistée comme un vélo à pédales qui ne peut dépasser 32 km/h, lorsque propulsée par le moteur, les policiers ont donc donné un billet d’infraction de 300 $ aux conducteurs, puisque la moto n’était pas plaquée.  

Dans les deux cas, les motocyclistes ont contesté l’infraction, affirmant qu’ils étaient au volant d’une bicyclette électrique.

Une chaîne et des pédales

En effet, leur «moto» était munie d’une chaîne et de pédales rabattues sur le côté, le motocycliste n’utilisant que la puissance de la batterie pour se déplacer. 

Selon les juges, le fait d’avoir circulé à plus de 32 km/h faisait en sorte que l’engin n’entrait pas dans la catégorie des bicyclettes assistées. Sauf que ce genre de contestation augmente dans les tribunaux partout au Québec.

Une cause semblable concernant un véhicule-jouet motorisé s’est rendue jusqu’en Cour supérieure, où le juge a invité le législateur à «revoir les dispositions applicables à ce nouveau secteur des transports», tout en parlant de «flou juridique». 

C’est que ces «motos» pesant parfois 125 lb respectent en tout point la réglementation actuelle des vélos électriques, pourvu qu’elles n’excèdent pas 32 km/h. 

«Il y a beaucoup de manufacturiers qui se sont joués de cette définition-là, pour faire passer dans la catégorie des vélos à assistance électrique tout un tas de scooters électriques», dénonce Magali Bebronne, porte-parole de Vélo Québec. 

À preuve, une moto identique, mais dépourvue de pédales, peut atteindre 90 km/h et circuler légalement sur les routes à condition d’être immatriculée par un détenteur de permis de motocyclette.

Débloquer le moteur

Or, sur les médias sociaux, des vidéos montrent comment débloquer le moteur et le faire passer de sa limite de 32 à 90 km/h.

«La cohabitation devient très dangereuse», fait valoir Mme Bebronne, qui demande à la SAAQ et au ministère des Transports d’agir au plus vite pour préciser la réglementation.

Du côté de la SAAQ, on assure être en «réflexion» dans le cadre de travaux législatifs pour mieux encadrer les engins.

Publié le 26 février 2023
Par Nicolas Saillant