Les organismes en défense collective des droits en besoin d’argent

Temps de lecture estimé : 4 minutes.
Manifestation pour l’indexation et la hausse des subventions gouvernementales des groupes de défense collective des droits à Québec, le 22 mars 2023

Tandis que le Plan d’action gouvernemental québécois sur l’action communautaire (PAGAC) 2022–2027 leur a offert moins que ce qu’ils espéraient, le montant de leur enveloppe de financement de base annuel n’est pas indexé. Les groupes s’appauvrissent donc d’année en année, particulièrement avec l’inflation actuelle. Le Regroupement des organismes en défense collective des droits (RODCD), qui représente près de 350 groupes, appelle au changement.

Actuellement, un groupe de défense collective des droits financé uniquement par le gouvernement provincial reçoit 96 000 $.

« Avec ça, il faut payer le loyer, le téléphone, l’organisation des activités et, surtout, les salaires, énumère Sylvain Lafrenière, coordonnateur du RODCD. Avec si peu de financement, il est difficile d’employer deux personnes à temps plein […] alors qu’on est en concurrence avec les autres secteurs. »

Une large mission

Pourtant, ces organismes ont du pain sur la planche. Impliqués dans des problématiques aussi variées que le logement, le chômage, les conditions de travail, la consommation, l’environnement, le droit des femmes, des personnes handicapées et de la communauté LGBTQ+, ces groupes travaillent à l’éducation et à la mobilisation des publics concernés, à leur représentation auprès des élus ainsi qu’à l’analyse des politiques en place.

« L’impact du manque de financement, c’est que les organismes ont de la misère à remplir toutes leurs missions », indique M. Lafrenière.

Il souligne également que certains groupes se retrouvent débordés parce que des institutions gouvernementales se délestent d’une partie de leurs responsabilités. « Le Tribunal administratif du logement ne répond pas aux personnes qui ont besoin d’information de base sur la loi ou il les envoie voir les comités logement, cite en exemple Sylvain Lafrenière. Or, ces comités sont là pour aider les gens qui veulent intenter des actions. Ça engendre une surcharge de travail particulièrement difficile pour les travailleuses de ces groupes — en grande majorité des femmes — considérant leurs conditions salariales. »

Un financement insuffisant

Après pratiquement 15 ans de statu quo, le gouvernement avait augmenté en 2019 le financement de 11 millions de dollars pour les groupes de défense collective des droits.

« L’initiative découlait du plan libéral de lutte contre la pauvreté, et la CAQ a rendu le financement récurrent, explique M. Lafrenière. À l’époque, nous avions des organismes qui vivotaient avec 50 000 $ ou moins par année, et ceux-là ont bénéficié des deux tiers de l’enveloppe. D’autres organismes ont reçu très peu, alors, maintenant, leurs besoins sont grands. »

De plus, la somme obtenue n’était pas indexée. « Donc, on perdait de l’argent chaque année », résume le coordonnateur.

Les choses ne se sont pas améliorées avec le Plan d’action gouvernemental québécois sur l’action communautaire 2022–2027.

« La hausse a été raisonnable pour 2022 (4,66 millions), mais pour chaque année qui suit, de très petites sommes sont prévues, et cela ne couvre même pas l’inflation, illustre Sylvain Lafrenière. On arrivera à 100 000 $ par organisme en 2027. Nous restons en bas de la médiane des groupes d’action communautaire autonome. »

Quelle est la hauteur des besoins ?

À la question de savoir de quelle somme aurait besoin un organisme de défense collective des droits pour bien fonctionner, le coordinateur du RODCD affirme que « les besoins varient d’un groupe à un autre. Mais pour un organisme qui couvre un grand territoire, avec une certaine densité de population, […] j’évalue que trois à cinq employés à temps plein ne seraient pas un luxe ». Un besoin pouvant s’élever à environ 300 000 $ de financement de base par organisme, estime Sylvain Lafrenière.

L’offre du gouvernement est donc loin du compte, malgré les attentes. « On nous avait dit que le PAGAC [actuel] serait évolutif, mais il n’a pas encore évolué, et l’arrivée de la nouvelle ministre responsable de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire (Chantal Rouleau) n’a rien changé. C’est comme si le gouvernement considérait le fait qu’on soit sous-financé comme normal », déplore M. Lafrenière. Or, la situation n’est plus viable pour les groupes de défense collective des droits, rappelle-t-il : « L’indexation de notre financement ne peut pas attendre le prochain PAGAC. »

Publié le 28 septembre 2024
Par Martine Letarte, Collaboration spéciale