
Seuls quelque 5 km séparent la station Berri-UQAM du Terminus Longueuil. Et le transport en commun est dur à battre sur ce trajet: ça prend à peine 7 minutes en métro pour relier ces deux pôles majeurs.
Or, c’est loin d’être le cas pour les personnes qui se déplacent à l’aide d’un fauteuil roulant.
Comme il n’y a pas d’ascenseur menant à la ligne jaune à la station Berri-UQAM ni à la station Longueuil−Université-de-Sherbrooke, impossible pour ces personnes de faire le trajet en métro.
Et pour les utilisateurs qui seraient tentés de se tourner vers le réseau d’autobus (généralement accessible aux gens en fauteuil roulant), ils auront toute une surprise: aucun autobus de la Société de transport de Montréal (STM) ne relie Montréal à Longueuil en passant par le pont Jacques-Cartier. La ligne 170, du Réseau de transport de Longueuil (RTL), fait ce trajet aux heures de pointe, mais elle n’est pas accessible aux gens qui circulent en fauteuil roulant.
La solution proposée par l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), responsable de la planification du transport en commun dans le Grand Montréal, c’est:
- De se rendre jusqu’à la station de métro Bonaventure.
- De prendre le Réseau express métropolitain (REM) jusqu’à la station Panama, à Brossard.
- De prendre un autobus du Réseau de transport de Longueuil (RTL) jusqu’au Terminus Longueuil.
Le trajet complet prend autour de 1h20.
Les ascenseurs sur la glace
La solution qui serait idéale d’un point de vue d’accessibilité, c’est l’installation d’ascenseurs. Mais elle paraît encore loin.
À Berri-UQAM, des travaux d’installation sont en cours pour permettre l’accès au quai de la ligne jaune. Mais pas à Longueuil. La STM nous a mentionné que cette station faisait partie de celles visées pour l’installation d’ascenseurs d’ici 2030 (phase 3 de ses travaux d’accessibilité), mais que ce projet était «tributaire du financement de la part du gouvernement du Québec».
La STM est en quelque sorte dans un cul-de-sac de ce côté-là, puisque le gouvernement du Québec ne lui a pas confirmé qu’elle pourrait recevoir les quelque 320 millions $ qui devaient financer la prochaine phase de ses travaux d’accessibilité.
L’organisme Ex Aequo a mis en place une campagne de mobilisation pour encourager les citoyens à contacter leur député pour les faire bouger dans ce dossier.
«Pour le moment, il y a cinq stations en cours de chantier, et quand elles sont finies, ça s’arrête là», se désole Marie Turcotte, directrice générale de l’organisme, qui souligne que plusieurs raisons font en sorte que les gens souhaitent utiliser un ascenseur.
Un rapport remis au ministère des Transports du Québec, qu’a pu consulter 24 heures, indique qu’un ascenseur est utilisé en moyenne 700 fois par jour dans le métro de Montréal. Cet assez haut volume indique que ce n’est pas seulement par des personnes qui circulent en fauteuil roulant.
«Ç’a toujours été mon argumentaire: oui, c’est nécessaire pour les personnes ayant une aide à la mobilité, mais c’est aussi utile pour les parents avec enfants qui ont des poussettes, pour les gens qui ont des bagages, pour ceux qui prennent le métro avec leur vélo, pour une personne âgée…», énumère Marie Turcotte.
Et le transport adapté?
Il est aussi possible de faire le trajet Montréal-Longueuil en ayant recours au transport adapté, souligne l’ARTM.
Mais ce type de service comporte d’importantes limites, notamment le fait que le transport doit être réservé à l’avance à une heure précise, indiquent les organisations avec qui 24 heures a parlé.
«Le transport adapté, c’est un transport planifié. Si je veux aller quelque part demain, il faut que je demande un transport aujourd’hui. Si je veux y aller aujourd’hui, bien c’est too bad», donne en exemple Serge Poulin, directeur général du Regroupement des usagers du transport adapté (RUTA).
Marie Turcotte abonde dans le même sens.
«Si je veux prendre le transport adapté avec mon conjoint et mon frère, je ne peux pas, car j’ai juste droit à un accompagnateur. Et combien de fois est-ce que j’ai été dans un spectacle et je n’ai pas pu rester au rappel parce que mon transport arrivait… il faut imaginer que notre vie, elle est programmée 24 heures à l’avance», illustre-t-elle.
«C’est important dans une société inclusive qu’on prévoie de donner à tous accès aux mêmes possibilités de déplacement qu’à monsieur et madame Tout-le-Monde. On est une société où on sait que la population est vieillissante, et avec l’âge apparaissent les incapacités. Il faut être en mesure comme société d’adresser cette réalité-là», résume-t-elle.
À Montréal, 27 des 68 stations de métro sont actuellement accessibles, et des travaux sont en cours dans 5 stations.