[Opinion] Projet de loi sur la santé: un déficit démocratique majeur alors que des dizaines de groupes sont laissés de côté

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POINT DE VUE / De nombreux groupes communautaires en santé et services sociaux et groupes de défense des droits sont plongés dans une désagréable frénésie depuis que le ministre Dubé a déposé son projet de loi 15, Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace. Bien au-delà de l’inconvénient de les rendre très occupé-e-s, l’empressement du gouvernement à faire adopter cette réforme majeure est surtout fort inquiétant et inadmissible!  

Pour faire une « histoire courte », car elle l’est en effet, le projet de loi a été déposé le 29 mars dernier. Deux semaines plus tard, les dates des consultations particulières étaient annoncées et les convocations envoyées aux quelques groupes invités à s’exprimer devant la Commission de la santé et des services sociaux. Le 20 avril, soit à peine trois semaines après le dépôt, commençaient lesdites consultations pour un total de 6 journées d’auditions étalées jusqu’au 23 mai.

Concrètement, cela aura donné moins de deux mois pour prendre connaissance du projet et de loi et intervenir. Est-il vraiment nécessaire de rappeler l’importance des consultations? L’Assemblée nationale elle-même souligne que les consultations peuvent permettre aux député-e-s de connaitre les besoins et l’opinion des groupes concernés et pour anticiper les conséquences imprévues ou les angles morts qui peuvent avoir échappé au législateur.

Or, ce projet de loi, lourd de 300 pages et de près de 1200 articles, soulève de nombreuses préoccupations notamment en ce qui a trait à l’autonomie des organismes communautaires en santé et services sociaux, à la participation démocratique au sein du réseau et à l’accélération de la privatisation, pour n’en mentionner que quelques-uns. Un moment appréciable d’étude et de réflexion est nécessaire pour en comprendre les tenants et aboutissants. Comment analyser adéquatement ce projet de loi avec toute l’attention requise dans des délais aussi brefs?

Non seulement le délai imposé pour produire une analyse pertinente est-il impossible à respecter pour bon nombre de groupes, mais le nombre d’intervenants consultés et leur variété sont minimes en proportion du nombre de personnes, usager-ère-s et professionnel-le-s du réseau, affectées par cette réforme.

Des dizaines de groupes exclus du débat démocratique

Une quantité de groupes communautaires en santé et services sociaux, de groupes de défense des droits et de regroupements professionnels tels que celui des sage-femmes sont disposés à analyser le PL15 et à informer le législateur de ses impacts potentiels. Ces groupes jouissent d’une expertise indéniable en ce qui concerne leur secteur d’activité et leur participation à l’exercice démocratique est essentielle.

Près d’une quarantaine de groupes ont manifesté leur souhait de s’exprimer lors des consultations, mais n’en ont pas la possibilité dans l’état actuel des choses. Ils n’ont pas été conviés aux consultations et sont laissés de côté, alors que le gouvernement refuse de prolonger les échéances pour recevoir des mémoires et d’ajouter des dates de consultations pour traiter de ce projet de loi gigantesque susceptible d’impacts sérieux sur la vie de toutes et tous. D’autres groupes, fortement préoccupés par le PL15, n’ont même pas envisagé de demander à être entendus étant donné la précipitation du processus qui nous est imposé.

Fin avril dernier, faisant référence à toutes les préoccupations émises au sujet du PL15, le ministre Dubé semblait persuadé que, malgré les petits ajustements que demanderont les uns et les autres à la recette du PL15, « on veut tous faire le même gâteau ». Peut-être vaudrait-il mieux écouter attentivement ce qu’ont à dire les nombreux groupes concernés par cette réforme majeure plutôt que de présumer que le PL15 répond aux besoins et aux réalités des gens?

C’est de notre droit à la santé dont il est question. Le Comité onusien sur les droits économiques, sociaux et culturels souligne que la participation de la population à la prise des décisions en matière de santé est un aspect essentiel de ce droit. Nos droits démocratiques sont également en jeu, car la participation au processus législatif est liée à notre liberté d’expression et à notre droit à l’information, en plus d’être essentielle pour la préservation de la démocratie.

Le plan Santé, annoncé début 2022 et déployé petit à petit depuis sans consultation publique de l’ensemble de la société civile ni débat démocratique, souffre d’un déficit démocratique majeur et nous est dicté dans une opacité déroutante. Le gouvernement tente de nous imposer le plus récent jalon de ce plan, ce projet de loi titanesque, par un processus indument limité et précipité.

Nous, groupes signataires, que nous ayons ou non réussi à intervenir dans ce cadre si limité, dénonçons ce déficit démocratique et demandons que des consultations vastes et complètes soient faites du projet de loi 15.

Lettre initiée par la Coalition Riposte au plan santé

Signataires:

  • Action santé Outaouais, Mathieu Charbonneau, directeur
  • Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), Émilie Charbonneau, deuxième vice-présidente
  • Association des retraitées et retraités de l’éducation et des autres services publics du Québec (AREQ-CSQ), Lise Lapointe, présidente
  • Association étudiante en sciences infirmières du Québec (AÉSIQ), Koralie Yergeau, porte-parole
  • Coalition des Tables Régionales d’Organismes Communautaires (CTROC), Benoit Larocque, président
  • Coalition Main rouge, Bertrand Guibord
  • Coalition pour la pratique sage-femme, Sarah Landry, coordonnatrice
  • Coalition solidarité santé, Geneviève Lamarche, coordonnatrice
  • Concertation régionale des organismes communautaires de l’Abitibi-Témiscamingue, Marie-Eve Duclos, coordonnatrice
  • Confédération des syndicats nationaux (CSN), Caroline Senneville, présidente
  • Conseil central du Montréal métropolitain- CSN, Dominique Daigneault, présidente
  • Corporation de développement communautaire de Laval, Marc Longchamps, directeur général
  • Ex aequo, Hugo Vaillancourt, Agent de défense collective des droits, dossier Santé et services sociaux
  • Fédération autonome de l’enseignement (FAE), Mélanie Hubert, présidente
  • Fédération de la Santé et des Services Sociaux (FSSS-CSN), Réjean Leclerc, président
  • Fédération des femmes du Québec, Sara Arsenault, responsable des dossiers politiques
  • Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ -CSN), Benoît Lacoursière, secrétaire général et trésorier
  • FRAPRU Front d’action populaire en réaménagement urbain, Véronique Laflamme, porte-parole
  • La Maison Marguerite, Sara Isabel Gomez, coordonnatrice communication et financement
  • Le collectif Soignons la justice sociale, Arnold Aberman, membre du collectif
  • Le RÉCIFS, Marjolaine Goudreau, présidente
  • Ligue des droits et libertés, Laurence Guénette, porte-parole
  • Maison Hina, Nancy Patry, intervenante aux relations extérieures
  • Mères avec pouvoir, Liliane Lapointe, chargée de projets
  • Mouvement pour l’autonomie dans l’enfantement, Roxanne Lorrain, co-coordonnatrice
  • Regroupement des groupes de femmes de la Capitale-Nationale, Élise Landriault-Dupont, co-coordonnatrice
  • Regroupement des organismes communautaires de l’Estrie (ROC Estrie), Dominique Vigneux-Parent, directrice
  • Regroupement des organismes communautaires de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine – Corporation de développement communautaire (ROCGIM-CDC), Geneviève Giguère, coordonnatrice générale
  • Regroupement des organismes communautaires de la région 03 -ROC 03, Karine Verreault, directrice
  • Regroupement des organismes communautaires des Laurentides, Benoit Larocque, coordonnateur
  • Regroupement des organismes en défense collective des droits (RODCD), Sylvain Lafrenière, coordonnateur
  • Regroupement des organismes ESPACE du Québec, Janie Bergeron, coordonnatrice
  • Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal (RIOCM), Marie-Andrée Painchaud-Mathieu, coordonnatrice
  • Regroupement Les sages-femmes du Québec, Josyane Giroux, présidente
  • Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire en CISSS et CIUSSS (RQIIAC), Mélanie Mailhot, coordonnatrice
  • Réseau d’action des femmes en santé et services sociaux (RAFSSS), Diana Lombardi, coordinatrice
  • Réseau des femmes des Laurentides, Isabelle Thibault, co-coordonnatrice générale
  • Réseau des groupes de femmes Chaudière-Appalaches, Karine Drolet, directrice générale
  • Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec, Marie-Andrée Gauthier, Coordonnatrice générale
  • Réseau Québécois Action Santé Femmes (RQASF), Lydya Assayag, directrice
  • Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA), Tristan Ouimet-Savard, responsable de la mobilisation
  • Service d’Entraide Passerelle, Marie Josèphe Pigeon, coordination générale
  • SOS DI Services publics, Marcel Faulkner, co-coordonnateur
  • Table de concertation de Laval en condition féminine, Joanie Beland, agente de projet, santé et bien-être
  • Table de concertation des groupes de femmes de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, Nastassia Williams – Valois, coordonnatrice
  • Table de concertation des groupes de femmes de la Montérégie, Gabrielle Pitre, directrice générale adjointe
  • Table de concertation des groupes de femmes du Bas-Saint-Laurent, Nathalie Bernier, coordonnatrice générale
  • Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie (TCMFM), Joanne Blais, directrice
  • Table des groupes de femmes de Montréal, Véronique Martineau, coordonnatrice
  • Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles, Gaëlle Fedida, présidente
  • Table régionale des organismes communautaires autonomes de l’Outaouais (TROCAO), Daniel Cayley-Daoust, direction générale
  • Table régionale des organismes communautaires de Chaudière-Appalaches, Murielle Létourneau, directrice
  • Table régionale des organismes volontaires d’éducation populaire (TROVEP) de Montréal, Julie Corbeil, coordonnatrice
  • Table ronde des organismes volontaires en éducation populaire de l’Outaouais (TROVEPO), Geneviève Tremblay-Racette, coordonnatrice
  • TROC Centre-du-Québec-Mauricie (Table régionale des organismes communautaires du Centre-du-Québec et de la Mauricie, Sylvain St-Onge, directeur général

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Publié le 23 mai 2023
Par Collectif