Beaucoup plus discrets qu’avant, les appareils auditifs modernes s’adaptent aux besoins de chacun et peuvent améliorer grandement la qualité de vie. On gagne même à en utiliser un dès la quarantaine ou la cinquantaine, si nécessaire.
Les Québécois sont de plus en plus nombreux à être durs d’oreille. Les pertes auditives touchent environ 10 % de la population, une proportion qui augmentera de manière notable, selon l’Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec. Et pas seulement en raison du vieillissement de la population.
Déjà, l’audiologiste Marie-Ève Beaulieu constate ce changement : « Je vois de plus en plus de gens de 55 ans, même de 45 ans. » On soupçonne notamment un lien avec l’utilisation d’écouteurs plusieurs heures par jour, pour le travail, le sport et les loisirs. L’Organisation mondiale de la santé s’inquiète même de l’audition des moins de 35 ans, en raison de l’exposition à la musique forte dans les bars et concerts.
Quand devrait-on consulter ?
Les pertes auditives sont généralement progressives. Dans le scénario le plus courant, la personne perd d’abord des fréquences sonores qui sont moins utiles au quotidien. Leur disparition passe donc inaperçue. Ça se corse quand les fréquences dans lesquelles se situe la parole commencent à être affectées.
Nombreux sont ceux qui mettent un certain temps à se rendre compte du problème, explique Marie-Ève Beaulieu : « Ils demandent souvent aux gens de répéter. Ils se plaignent que leur entourage marmonne. Or, si tout le monde marmonne, c’est possible que le problème soit du côté de la personne qui se plaint. »
Les situations bruyantes peuvent être révélatrices : les repas de groupe au restaurant par exemple, au cours desquels on a plus de mal à suivre les discussions. On constate aussi qu’on monte le son de la télévision, ou que les conversations téléphoniques sont devenues laborieuses parce qu’on ne peut pas voir son interlocuteur prononcer les mots. Il est plus que temps d’agir.
Où consulter quand on entend moins bien ?
Si on soupçonne une perte auditive, on peut d’abord procéder à un dépistage auditif, qui peut être réalisé par divers professionnels. Les audioprothésistes les offrent souvent dans leurs cliniques. Cette étape n’est pas obligatoire mais il s’agit d’un moyen rapide de déterminer si on a raison de soupçonner une perte auditive. Si un suivi s’avère nécessaire, on sera référé à un audiologiste.
C’est l’audiologiste qui est habilité à évaluer l’audition, déterminer un niveau de perte auditive et proposer des solutions. Ses services sont offerts au public et au privé.
Dans le réseau public, certains établissements exigent une requête d’un omnipraticien. Les cliniques privées ne la demandent pas et l’évaluation y coûte environ de 75 à 100 dollars. Elle est couverte par la plupart des régimes d’assurance privés.
Le degré de surdité est établi par l’intermédiaire d’un ensemble de tests. La cause présumée sera précisée si elle semble évidente : une exposition importante au bruit dans un contexte professionnel, entre autres. Le résultat de ces tests est exprimé en décibels perdus et indique les fréquences sonores manquantes.
L’évaluation comporte aussi des recommandations personnalisées selon les défis du patient, par exemple l’utilisation d’un téléphone spécial, des stratégies pour adapter son domicile ou pour rendre les conversations plus aisées.
Comment choisir une prothèse auditive ?
Marie-Ève Beaulieu veut briser l’image qui en rebute plus d’un : « Le gros appareil beige de nos grands-pères, ça n’existe plus ! » Les appareils auditifs sont maintenant discrets, et ils sont de plus en plus raffinés technologiquement.
Ils se déclinent grosso modo en trois catégories. Le choix découle principalement du degré de perte auditive et des préférences de chacun.
Pour les pertes auditives légères, un appareil intra-auriculaire fera l’affaire. Comme son nom l’indique, il est placé directement dans l’oreille. Il peut être fait sur mesure, moulé à l’intérieur du pavillon de l’oreille, ou être un tout petit dispositif glissé dans le canal auditif.
Pour les problèmes auditifs plus importants, on suggère un appareil de type contour d’oreille (behind the ear). Le corps de l’appareil se trouve derrière le pavillon de l’oreille et est relié à un petit embout qu’on place dans le canal auditif. Il se fait en petit format, pour ceux qui ont une assez bonne audition, à l’exception de certaines fréquences précises. Son embout laisse passer les sons naturels et n’amplifie que les sons correspondant aux fréquences que l’utilisateur n’entend pas bien.
Une version d’un peu plus grande taille, plus puissante, conviendra pour une surdité assez importante.
Au-delà de ces grandes catégories, explique Marie-Ève Beaulieu, c’est une question de choix personnel : « Les appareils, c’est comme les voitures. Il y a plusieurs formats, modèles et options. Il faut aller chercher ce qui est intéressant pour vous. »
Tous les appareils récents ont une fonction Bluetooth, qui permet de les contrôler avec une petite télécommande ou à partir d’un téléphone intelligent. On peut donc faire rapidement et discrètement des ajustements de volume, entre autres.
L’audioprothésiste configure l’appareil en y programmant plusieurs modes, à sélectionner selon qu’on est au restaurant ou à la bibliothèque, par exemple. Dans un environnement bruyant comme un restaurant, il est possible de moduler la prise de son pour qu’elle priorise l’interlocuteur et minimise les bruits ambiants. Ces modes peuvent être choisis manuellement ou changer automatiquement selon l’analyse de l’environnement que fait l’appareil. Au fil des ans, ce dernier peut être ajusté si la perte auditive empire.
La Régie de l’assurance maladie du Québec couvre le coût des appareils dans certaines situations. Selon des critères bien définis, détaillés sur le site de la RAMQ une ou deux prothèses peuvent être fournies.
Pour les gens qui doivent payer de leur poche ou qui veulent opter pour un produit plus sophistiqué, les prix varient d’environ 1 000 dollars par oreille pour un modèle de base jusqu’à environ 4 000 dollars pour un modèle haut de gamme. Les appareils sont parfois couverts par les assureurs privés.
Attention : on peut acheter au Canada, sur le Web, des appareils à très bas prix, mais ils ne répondent pas aux normes de sécurité. Il vaut mieux les éviter.
Peut-on récupérer l’acuité perdue sans prothèse ?
Malheureusement, quand l’acuité est perdue, elle ne peut pas être récupérée. « Quand la cellule auditive est détruite, explique Marie-Ève Beaulieu, elle ne se régénère pas. Pensez à un jardin avec du beau gazon. Quand on marche dessus, les brins d’herbe plient — c’est l’équivalent d’une fatigue auditive. Si on marche toujours au même endroit, le gazon finit par ne plus repousser — c’est la perte auditive. »
On gagne alors à utiliser une prothèse auditive. Car non seulement une bonne audition améliore la qualité de vie, mais de nombreuses études montrent aussi qu’une perte auditive non traitée peut favoriser l’apparition de la démence, en laissant des zones du cerveau s’atrophier. Chez les aînés, une mauvaise audition peut fausser des tests cognitifs, voire conduire à des erreurs médicales si la personne ne comprend pas bien les questions du personnel. Elle peut aussi causer des problèmes de localisation dans l’espace et d’équilibre.
S’habituer à un appareil auditif peut prendre un certain temps. Il ne faut pas se décourager, insiste Marie-Ève Beaulieu. On met toutes les chances de son côté en retournant voir l’audioprothésiste pour faire des ajustements au besoin, le temps de s’adapter. Ces efforts en valent la peine, dit l’audiologiste.
Le texte a été modifié le 25 avril pour préciser qu’un dépistage auditif peut être réalisé par divers professionnels, mais pas une évaluation de l’audition, toujours réalisée par un audiologiste. Le détail des critères de remboursement des prothèses par la RAMQ a été remplacés par un hyperlien vers le site, et le prix des prothèses haut de gamme a été revu à la baisse.