Après des années d’attente, Québec reporte encore une fois la réforme du financement pour les élèves en difficulté qui était attendue avec impatience par certains acteurs du réseau scolaire.
Depuis 2018, le ministère de l’Éducation travaille à assouplir les démarches administratives en lien avec le financement des services aux élèves à besoins particuliers, qui sont basés sur des codes de difficulté attribués sur la base de diagnostics.
La réforme en branle, donc l’implantation avait été annoncée pour la rentrée 2023, visait justement à abolir ces codes de difficulté afin de pouvoir offrir des services aux élèves plus rapidement, sans avoir à attendre le fameux diagnostic.
Des projets-pilotes mis en place cette année ont toutefois «confirmé l’ampleur et la complexité des travaux requis pour que les allégements administratifs permettent de répondre davantage aux besoins des élèves», peut-on lire dans une lettre transmise par le ministère de l’Éducation au réseau scolaire la semaine dernière.
Québec souhaite «consolider le nouveau modèle de financement et disposer d’un plus grand délai d’expérimentation (…) avant de faire des propositions à l’ensemble du réseau», ajoute-t-on.
La déclaration des codes de difficulté liés au financement se poursuivra donc pour une année supplémentaire, indique Québec.
Déception
Ce report déçoit certains acteurs du réseau scolaire, qui attendaient ces changements avec impatience. «On se pose toutes sortes de questions, on aimerait que ce soit mis en place le plus rapidement possible», a indiqué Kévin Roy, président de la Fédération des comités de parents du Québec.
Des parents doivent encore trop souvent se tourner vers le privé pour obtenir un diagnostic afin que leur enfant obtienne des services à l’école, souligne-t-il. «On est encore là», laisse tomber M. Roy.
Du côté du syndicat qui représente les professionnels du réseau scolaire, on est aussi «déçu que ça n’aille pas plus vite».
«On espère vraiment des changements pour le mieux, on espère que ça ne sera pas seulement un coup d’épée dans l’eau», affirme Jacques Landry, président de la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ).
Ce dernier espère que la réforme attendue permette aussi de changer le modèle d’intervention, qui se fait présentement «en silo» et de manière individuelle.
Les professionnels aimeraient pouvoir avoir la marge de manœuvre pour travailler davantage en concertation et en prévention auprès de plusieurs élèves, explique M. Landry.
De son côté, l’expert en persévérance scolaire Égide Royer réclame aussi ces changements depuis longtemps. Il estime toutefois que cette réforme doit être accompagnée d’une révision complète de la politique d’adaptation scolaire, qui aura bientôt 25 ans. «Au cours de cette période, le nombre d’élèves en difficulté a plus que doublé», fait-il remarquer.
Dans le réseau public, près d’un élève sur quatre est maintenant considéré handicapé ou en difficulté d’adaptation et d’apprentissage (EHDAA), selon le jargon du ministère. Cette désignation comprend tous les élèves qui ont un plan d’intervention.
Cette réforme ne fait toutefois pas l’unanimité dans les rangs des enseignants. À la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ), on craint que la nouvelle approche entraîne plutôt une diminution des services aux élèves.