Québec reporte l’élargissement de la consigne des bouteilles et canettes

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Elle est attendue « depuis plusieurs, plusieurs années », concède le ministre de l’Environnement, mais il faudra l’attendre encore un peu plus longtemps. Benoit Charette a annoncé, mercredi matin, que l’implantation de la consigne élargie au Québec se fera six mois plus tard que prévu.

Prévue d’abord pour l’automne 2022, la réforme de la consigne sera finalement implantée au printemps 2023.

« Nous sommes très, très soucieux des enjeux et des impacts de la pandémie qui ont causé beaucoup de torts à différents acteurs et c’est la raison pour laquelle nous avons convenu d’un délai supplémentaire de six mois », a expliqué le ministre Charette lors d’un point de presse portant sur ce projet de règlement et celui de la modernisation de la collective sélective.

« Tout le réseau des détaillants a été largement affecté par la pandémie. Pour nous, ce sont des partenaires incontournables. Il y a eu, malgré cette pandémie, des dizaines de rencontres au cours de la dernière année, mais clairement, les effectifs viennent à manquer, le temps vient à manquer », a précisé le ministre.

« C’est un débat qui remonte au début des années 80 pour ce qui est de la consigne, donc se donner six mois de plus pour bien faire, dans les faits, c’est un délai qui est tout à fait raisonnable. » – Benoit Charette, ministre de l’Environnement

Annoncée en janvier 2020, la réforme de la consigne en prévoit l’élargissement à tous les contenants de verre, de plastique ou de métal de 100 millilitres à 2 litres. La plupart de ces contenants feront ainsi l’objet d’une consigne de 10 ¢, sauf les bouteilles de vin et de spiritueux, pour lesquels le tarif sera de 25 ¢.

Dès son implantation, le réseau de retour sera tenu de desservir au moins 90 % de la population québécoise avec quelque 1500 points de service, a rappelé Benoit Charette, selon qui un délai de six mois, « c’est bien peu cher payé » pour offrir un système moderne qui respecte les plus hauts standards.

Quant à la réforme du système de collecte sélective, qui exigera des entreprises qui produisent des contenants, des emballages et des imprimés d’en prendre la charge de la récupération au recyclage, la transition se fera graduellement à compter de l’automne 2022 pour un déploiement complet au 1er janvier 2025.

Les redevances à l’enfouissement seront revues

Ces annonces du ministre surviennent au lendemain de la publication d’un rapport sur la gestion des matières résiduelles par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).

L’organisme y conclut que le Québec est en voie de rater ses cibles de réduction des déchets, en dépit « des mesures importantes de rattrapage amorcées », soit la modernisation de la collecte sélective, l’élargissement de la consigne et la stratégie de valorisation de matière organique.

Les commissaires ont aussi souligné à gros trait le fait que de miser sur le recyclage ne suffit plus au Québec pour contrôler la quantité de matières résiduelles qui doit être éliminée chaque année, que ce soit par enfouissement ou par incinération.

Selon eux, il y a urgence d’agir en réduisant la quantité de déchet à la source, notamment en consommant de façon plus responsable. Parmi leurs propositions figurent entre autres la mise sur pied de tarifs à l’enfouissement dissuasifs plutôt qu’incitatifs, le coût d’enfouissement étant particulièrement bas au Québec, selon les commissaires.

S’il s’est dit heureux mercredi de confirmer des « avancées majeures » comprenant « des objectifs qui nous permettront de répondre au rapport du BAPE », le ministre de l’Environnement ne se berce toutefois pas d’illusions.

« Il faut se rappeler que c’est un rapport que j’ai moi-même commandé. Donc si je l’ai commandé, c’est qu’il y avait une indication comme quoi ça n’allait pas. » – Benoit Charette, ministre de l’Environnement

« J’aime bien vanter le leadership du Québec en environnement, mais je dis aussi très ouvertement et très franchement qu’en matière de la gestion de la matière résiduelle, malheureusement on n’est pas les leaders qu’on souhaiterait être », a ajouté Benoit Charette.

« Il y a des avancées majeures qui doivent être faites. […] On ne peut pas s’arrêter là. »

« Si on fait référence au rapport du BAPE, je vous confirme que dans les prochaines semaines, prochains mois à tout le moins, on devrait aussi déposer un nouveau projet de règlement sur les redevances à l’enfouissement », a fait savoir le ministre.

« C’est bien vrai, à partir du moment où l’enfouissement est la formule la plus économique, la formule la plus facile, ça ne permet pas développer de nouvelles stratégies », a-t-il concédé.

Aussi questionné au sujet d’autres suggestions contenues dans le rapport du BAPE, comme celles d’imposer une écotaxe ou d’interdire la mise en marché de certaines matières ou produits à usage unique, Benoit Charette ne s’est cependant pas prononcé.

À écouter : En quoi consiste le nouveau système de collecte sélective?

Publié le 26 janvier 2022
Par Joëlle Girard