Ressources d’hébergement: une directive pour éviter de séparer les couples

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Le ministère de la Santé vient de publier des directives à l’intention des établissements afin d’éviter que les couples nécessitant de l’hébergement en CHSLD, en ressource intermédiaire (RI) ou en ressource de type familial (RTF) ne soient séparés.

Au cours des dernières années, les médias ont rapporté des histoires déchirantes à propos de personnes aînées séparées de leur conjoint ou conjointe dans des ressources d’hébergement. Des organismes comme le Conseil pour la protection des malades et la FADOQ ont réclamé aux autorités de faire preuve de davantage de souplesse et d’humanisme.

Dans un nouveau cadre de référence portant sur les mécanismes d’accès aux CHSLD, RI et RTF mis en ligne il y a quelques jours, le ministère de la Santé consacre un chapitre entier aux demandes d’hébergement pour les couples.

La réorganisation du réseau de la santé et des services sociaux en 2015 a mis en lumière certaines disparités dans les règles d’accès à l’hébergement et soulevé la nécessité de les harmoniser, explique-t-on dans le document.

Dans un échange de courriels avec Le Soleil, le ministère de la Santé indique que les CISSS et les CIUSSS ont toujours traité les demandes d’hébergement pour les couples «avec une attention particulière», mais que le nouveau cadre «vient donner des précisions supplémentaires qui font office d’orientation pour les établissements».

«Il n’y avait pas de document officiel émanant du MSSS ou de directive explicite» à ce sujet, précise la porte-parole Marie-Hélène Émond.

Afin de limiter les répercussions psychologiques liées à une séparation, et ce, pour des considérations humanitaires, l’orientation des couples vers une ressource d’hébergement public doit faire l’objet d’un traitement particulier

—  Le ministère de la Santé, dans son nouveau cadre de référence

Les orientations du ministère ne sont pas simples à comprendre pour le commun des mortels, mais voici en gros ce qu’elles disent:

  • La notion de couple fait référence à des personnes entretenant une relation significative, et ce, peu importe leur orientation sexuelle.
  • Elle est également élargie aux membres d’une même famille (père, mère et enfant en sévère perte d’autonomie), ainsi qu’aux personnes présentant une relation fusionnelle de codépendance.
  • Dans la situation où les deux conjoints sont reconnus admissibles à l’hébergement, les demandes doivent être traitées de façon simultanée et le couple doit être orienté vers le même milieu.
  • Si les demandes d’hébergement pour un couple sont acheminées à des moments différents, la seconde demande sera traitée en fonction de l’ancienneté de la première.
  • Les milieux d’hébergement doivent, «lorsque cela est possible», favoriser l’admission des couples simultanément et, le cas échéant, minimiser les délais entre les deux admissions.
  • Lorsqu’un des deux conjoints requiert un traitement prioritaire ou urgent, s’il est hébergé de manière transitoire, le deuxième conjoint aura le choix de l’être lui aussi ou de maintenir sa demande en attente pour l’autre milieu désigné.
  • Si la demande d’hébergement d’un des deux conjoints est formulée alors que le premier conjoint est déjà hébergé dans un CHSLD, une RI ou une RTF, elle sera priorisée pour une intégration au même endroit si la personne requiert le même type de ressource.

Le ministère de la Santé invite les établissements à favoriser la réunification des couples «lorsque cela est possible».

«Lorsque les couples ne peuvent être admis dans le même milieu selon les critères énoncés, l’établissement doit favoriser les visites du conjoint ou de la conjointe sur une base régulière, notamment en référant vers des organismes du milieu pour l’organisation du transport pour les visites ou en collaborant avec les familles et les proches des usagers concernés», écrit encore le ministère.

«Des écrits pas toujours respectés»

Pour le président du Conseil pour la protection des malades, Paul G. Brunet, le cadre de référence du ministère règle, «au moins en théorie», plusieurs questions entourant les couples de 30, 40, 50 ou même parfois 60 ans de vie commune.

Paul G. Brunet souligne cependant que «plusieurs écrits, bien que constituant la marche à suivre dans diverses situations, ne sont pas toujours respectés». On évoque des excuses comme «l’ignorance de l’écrit» ou le fait que «telle ou telle règle n’est pas applicable», déplore-t-il.

«Le pire exemple […] est le fameux “hébergement transitoire”, pourtant documenté et interdit ou défendu, qu’on impose pratiquement aux usagers et à leurs proches, en attendant dit-on qu’on trouve le site répondant à la condition de l’usager. On sort souvent et sauvagement une personne âgée du lieu dans lequel elle attend une place en CHSLD pour l’envoyer à un endroit dit “transitoire”. Et parfois, le caractère transitoire dure plus longtemps ou pire, on l’envoie à un autre site transitoire», dénonce le président du Conseil pour la protection des malades.

Publié le 23 avril 2023
Par Élisabeth Fleury